dimanche, février 27, 2011

le mystère de l'homme au masque de fer.

Shahrzad et le mystère de l'homme au masque de fer, ou la folie grave des illusions du pouvoir.


Vous connaissez Shahrzad a présent, elle est parfois intenable, incontrôlable, virevoltante, imprévisible, remuante, et pourtant toujours aussi adorable. J'aime sa grande précision. L'illustre Sherlock Holmes aurait sans doute aimé la courtiser et partager avec elle des aventures. Il est des femmes comme cela. Elles ont comme une paille au bout des doigts et elles s'en servent pour agiter les neurones de leurs amants. Elles adorent souffler le feu dans les esprits. Elles reviennent sans cesse à la charge. Pauvre Sherlock, il n'aurait sans doute pas tenu la distance. je plaisante.

Depuis quelques jours déjà, Shahrzad se sert une fois de plus de mes doigts pour sonder un des mystères de l'histoire, un célèbre mystère, celui du Masque de Fer. Cette énigme passionna de grands écrivains comme voltaire, Dumas ou Pagnol par exemples, qui proposèrent des solutions, mais aucune ne semble convaincante. Pourquoi Louis XIV, monarque absolu, monarque au pouvoir contesté dès le début, eut-il recours à ce terrible moyen pour effrayer ses adversaires? C'est ce qui intrigue Shahrzad, c'est ce qu'elle cherche à savoir. Elle a tout de suite fait une comparaison entre la paranoïa meurtrière du Calife Harun Al Rashid, dont elle traite le cas à bagdad, c'est sa principale attribution, et ce qui semble relever aussi d'une forme de maladie mentale chez le Roi Soleil. Le pouvoir pour s'affirmer doit se faire craindre d'abord, essayer de se faire aimer ensuite, c'est question de survie et c'est déjà une forme de folie meurtrière en soi.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Homme_au_masque_de_fer

http://users.belgacom.net/renedec/pagehis2.htm

http://www.jesuiscultive.com/spip.php?article11

http://www.planet-techno-science.com/sciences-humaines/les-restes-de-lhomme-au-masque-de-fer-russe-retrouves-chercheurs/

http://unesolitude.unblog.fr/2007/04/12/le-masque-de-fer/

http://muses-du-net.cultureforum.net/t75-homme-celebre-l-homme-au-masque-de-fer

Ceux qui sont en haut des structures pyramidales de pouvoir sont-ils (sont-elles) tous fous et même fous très dangereux? C'est ainsi que raisonne Shahrzad. Elle est toujours directe et c'est ce qui m'amuse le plus chez cette Newton au féminin, elle déteste les apparences. Bien sur, il est facile de déceler la paranoïa d'un Staline ou d'un Hitler, de calculer les dégâts qui se chiffrent en millions de victimes, mais c'est là encore une chose étonnante chez Shahrzad, dans sa façon de raisonner, elle cherche l'avantage. Pour elle, la maladie suit un but, protéger d'abord celui qui l'incube et la développe.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Parano%C3%AFa

La paranoïa n'est pas la seule forme de maladie mentale qui vise "à protéger" les hommes ou les femmes avides de pouvoir et qui semblent ne suivre qu'un seul but, arriver en haut de la pyramide, l'endroit où ils pensent être le plus à l'abri, l'endroit le plus jouissif pour eux, car c'est aussi une forme de recherche du plaisir.

Le caractère meurtrier est observable dans l'élimination des rivaux, des clans adverses, il conduit à l'absolutisme et à une très grande solitude, il consiste de fait à faire le désert autour de soi, à n'accepter que des soumis inoffensifs, des castrés du pouvoir à coté de soi. C'est un paradoxe de ces maladies mentales que de produire l'inverse de ce qui est souhaité par le malade. Pas facile de garder pied dans la réalité. Louis XIV et Harun Al Rashid vont pourtant parvenir à s'en sortir, à tirer avantage de cette forme de drame qu'il doivent vivre. Comment? Parce qu'il seront très bien entourés, parce qu'ils trouveront un ancrage stable en amour. Cela créera dans deux civilisations différentes des sortes d'apogée de l'absolutisme éclairé, avec au final une explosion artistique et culturelle, des avancées dans toutes sortes de domaines. Louis XIV n'a pas dit "l'état c'est moi" comme on a voulu le lui faire dire, mais dans son testament, sur son lit de mort, il confiera qu'il n'a été que le premier serviteur de l'état, rien d'autre.

Une des formes les plus courantes de la folie du pouvoir est la perte du contact avec la réalité. Cela conduit aux exagérations, aux manipulations, aux complots que le pouvoir organise lui même sans cesse comme autant de mauvais rêves qu'il cherche à exorciser. Il est normal qu'il en soit ainsi puisque le pouvoir est une forme d'illusion. Il ne peut donc se maintenir qu'en générant des illusions, et souvent toutes sortes de propagandes qui ne sont que des délires en fait. Hitler l'avouera: "plus ces délires sont gros et plus ils sera facile de faire en sorte que le peuple fasse sien ces délires!"

Et c'est là toute la différence entre les grands Rois, les véritables guides de leurs peuples et les fous criminels qui ont perdu pied, c'est là toute la différence entre un Louis XIV et un Joseph Staline par exemple. Le grand Roi, le premier serviteur du peuple donc, c'est celui qui sait gouverner par l'imaginaire, c'est celui qui se fait craindre par l'imaginaire.

Harun Al rashid, le calife fou qui fait couper les têtes de ses épouses dès la première nuit. Shahrzad en raconte l'histoire, elle crée un imaginaire amusant. Qui peut ensuite savoir ce qui est vrai ou non dans cette histoire. C'est sans importance, le peuple a sa part de rêve, il rêve même éveillé et il sourit, il rit même de bon cœur des contes, fables, affabulations, délires et autres inventions de Shahrzad.

L'homme au masque de fer, quel incroyable coup de génie !

Qui en a eu l'idée? Vraiment c'est cela le plus intéressant dans cette histoire. Quel est le message, c'est la première question qui me vient. Il semble très simple. Moi Roi absolu, je peux non seulement vous prendre votre liberté, vous enfermer à vie si tel est mon désir, mais je peux aussi vous faire disparaitre, supprimer votre identité. Voltaire ne s'y est pas trompé. Le masque de fer est le meilleur symbole du pouvoir absolu. Mais toute l'intelligence du Roi Louis XIV, sera d'en rester au symbole et pour cela il n'en était besoin que d'un seul.

Oui, l'histoire du masque de fer est un coup de génie, un complot extraordinaire de la royauté, une mise en scène. C'est presque du Molière, mais non, je ne crois pas que ce soit Molière qui aie conçu cela, non, je crois plutôt à Louis XIV lui même. Pourquoi? Tout simplement parce que ce masque de fer ou de velours noir épais ou de cuir, c'est un rituel connu dans les milieux sado masochistes et c'est même comme une sorte d'archétype dans ce genre de pratiques sexuelles. On retrouve bien là certains traits des comportements du Roi Soleil.

L'homme au masque de fer, une forme certaine d'humour.

Je suis surpris que Voltaire, Dumas, Pagnol, et tant d'autres écrivains célèbres n'ont pas signalé cela. Si pourtant, il existe une rumeur. Molière aurait été l'homme au masque de fer. Après tout, pourquoi pas. Un valet suffisait pour jouer ce rôle à plein temps. Les hôtes de passage, les hôtes de marque qui voulaient vivre cette expérience étrange de l'enfermement, de la perte totale d'identité, dissimulés dans la plus secrète des cellules du Royaume, celle dont aucun cri ne pouvait sortir, ne devaient pas manquer. Je trouve Molière assez fou pour avoir voulu tenter l'expérience en connivence avec Louis XIV. Oui c'est possible. Louis XIV a t'il essayé cela aussi? Il en est plus que capable lui aussi.

Ce qui importe dans ce symbole c'est que le peuple en perçoive l'humour, un humour très fin, très raffiné, un humour qui laisse planer le doute. C'est très similaire avec les 1001 nuits de Shahrzad. Le Calife est fou, il peut couper la tête de qui il veut, quand il veut, il en a le droit, le pouvoir. Pourtant le Calife montre qu'il est vraiment un grand Roi, il ne sert pas de ce pouvoir, il en joue, il s'en amuse, il encourage la liberté de penser et de créer dans le respect de son autorité. C'est une forme d'équilibre, de bonne entente, de rappel des règles.

Les peuples dans leur prudence ont préféré montrer aux Rois, de temps en temps, au gré des révolutions, qu'eux aussi pouvaient couper leurs têtes couronnées quand ils voulaient.

(C) Ivano Ghirardini, 27 février 2011